
Je me souviens qu'un jour des pierres d'un château forézien ont gagné les lointains rivages de la " Neuve France ". Je me rappelle encore d' un coureur des bois qui, né sous les lys de France, a gagné le Nouveau Monde et combattu les Iroquois. Puisque le Québec se souvient, pourquoi pas moi ?
Good morning Forez !
Histoire de ressortir la fière devise du Québec, " Je me souviens que je suis né sous les Lys de France ", on débute par François-Saturnin (de) Lascaris d'Urfé (1639 ou 1641-1701). Petit neveu d'Honoré d'Urfé, François de Lascaris d'Urfé est un des neuf enfants de Charles-Emmanuel d'Urfé et Marguerite-Marie d'Allègre. On a lu tantôt qu'il était né à Paris, parfois dans l'Ain à Bâgé-le-Châtel, voire même à la Bâtie d'Urfé. Son père, d'après une publication de M. Bruel, de la société d'archéologie du Forez (La Diana), était comte d'Urfé, marquis de Baugé et, entre autres lieux, seigneur de La Bâtie. Parmi ses soeurs, deux étaient religieuses au couvent des Clarisses de Montbrison. Son grand-père était Jacques II d'Urfé, frère d'Anne et Honoré.
Il fut ordonné prêtre de Saint-Sulpice en 1665 ou 1666. Missionnaire, il passa de nombreuses années au Canada, de 1668 à 1687, date à laquelle il se retira définitivement à Bâgé-le-Châtel où il s'éteignit.
Les habitants ont donné son nom à Baie d'Urfé, petite ville située à l'extrémité occidentale de l'île de Montréal, érigée en commune il y a cent ans cette année.
En 1685, Jean-Baptiste de La Croix de Chevrières de Saint-Vallier, grand vicaire de Mr de Laval, premier évêque du Québec, auquel il était appelé à succéder sous peu, visita les paroisses de la Nouvelle-France. Il embarqua de France, accompagné d'une dizaine d'ecclésiastiques dont François de Lascaris d'Urfé, également Doyen de la cathédrale du Puy, comme l'indique Saint-Vallier dans son compte-rendu publié en 1688: Estat présent de l'église et de la colonie françoise dans la Nouvelle France.

Gosselin dans L'église du Canada depuis Monseigneur de Laval jusqu'à la Conquête, mentionne sur l'île de Montréal, qui appartenait à la Compagnie de Saint-Sulpice, les paroisses de Villemarie, Lachine et La-Pointe-aux-Trembles, ainsi que trois missions: l'Ile Sainte-Thérèse, du Haut-de-l'Ile et Chateauguay.
C'est au moment de ce voyage, écrit Jean-Baptiste de La Croix de Chevrières de Saint-Vallier, que "Mr d'Urfé a désiré qu'on le mit au nombre de ceux qui desservent des paroisses et il en conduit une des plus exposées avec toute l'application et l'ardeur de son zèle".
Le missionnaire se faisait curé, en l'occurrence de la paroisse de Saint-Louis-du-Haut-de-l'Ile ou Saint-Louis-du-Bout-de-l'Isle.
Exposée elle l'était assurément. En 1687, elle fut attaquée par les Iroquois. Il y eut des tués côté français dont le premier marguillier de la paroisse, Jean de Lalonde dit l'Espérance, qui avait débarqué de sa Normandie en 1665. Le prêtre en réchappa. Quant à la première chapelle, la chapelle Saint-Louis (1686), elle n'existe plus aujourd'hui. A son emplacement a été érigé un petit mur élevé avec des pierres prises dans le Forez, du château des Cornes d'Urfé, à Champoly, berceau de la famille. Une inscription indique: "Ici s'élevait la chapelle Saint-Louis, bâtie en 1686 par François d'Urfé, sulpicien (1641-1701)."
On doit d'abord à Marguerite Fournier de connaître cette histoire, relatée dans un article publié dans un numéro de Village de Forez. Elle évoque des pierres prélevées par la Diana, et convoyées au Québec, par bateau précise-t-elle. Le monument fut inauguré le 25 juin 1961 en présence du Préfet de la Loire, M. Collaveri, à l'occasion du 275e anniversaire de Baie d'Urfé. Grâce aux archives de feu M. Marius Delomier, on en sait beaucoup plus sur cette belle histoire.

C'est le maire de Baie d'Urfé de l'époque, Thomas-Roche Lee, un anglophone, qui fut à l'origine de cette commémoration et des liens qui se tissèrent pour l'occasion entre le Forez et le Québec. Il semble qu'il entreprit d'abord de contacter les représentants de la France en visite outre Atlantique puis, quelques jours plus tard, la Diana.

Thomas-Roche Lee évoquait dans ses courriers le projet envisagé, qui fut respecté à la lettre, à savoir une plaque rendant hommage au fondateur de Baie d'Urfé, scellée dans un tumulus de pierres en provenance du "château d'Urfé". Sans préciser -en tout cas dans les extraits que nous avons pu lire - s'il songeait aux Cornes d'Urfé ou à La Bâtie. Peut-être plus à La Bâtie dont certaines pièces sont conservées à New York - ce n'est pas si loin - que du berceau de la famille. "... Nous croyons que les liens unissant la vieille terre et le pays neuf, le lieu de naissance de d'Urfé et le coin de nouveau continent où il a tant prodigué son dévouement, en seraient resserrés...", soulignait-il.
M. Lee examine le blason d'Urfé gravé sous la coupe en argent de François d'Urfé, conservé à la cathédrale de Montréal (/dr)
Les pierres furent prélevées au château des Cornes d'Urfé, excepté un bloc prélevé quant à lui à la Bâtie. A l'origine, le chargement devait être acheminé par voie aérienne comme en témoigne une lettre de la Diana en date du 28 novembre 1960. Mais il semblerait qu'Air France ait finalement refusé de les transporter. D'après M. Bruel, déjà cité, elles le furent par bateau, à bord du cargo Ludolf-Ollendorf très précisément. Elles arrivèrent à Baie d'Urfé le 6 février 1961.
Le 25 juin, les radios locales, les sociétés sportives, le monde associatif participèrent aux festivités dont le point d'orgue fut le dévoilement du petit monument en présence du Préfet de la Loire, représentant la France, François Collavéri. Celui-ci avait été précédemment Préfet de l'Ain. Il remit au maire de Baie d'Urfé, au nom du Département notamment, quelques présents dont un album de photographies d'Ito Josué des Cornes d'Urfé, de Bâgé-le-Châtel,..., une gravure ancienne représentant la Bâtie, la copie de l'acte de sépulture de François d'Urfé et celle de son éloge funèbre.
Il prononça un long discours dans lequel il rappela le rôle joué par le Canada dans les deux guerres mondiales, en particulier sur le sol français et qu'il concluait par ces mots: " Que vive heureux et prospère le Canada aimé et ami !" Il précisait aussi que, suite aux démarches de M. Lee, il avait été alerté par le président de la République himself.
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"L'ancien hôtel de ville de Baie d'Urfé est la cible de vandales
A Montréal, sept hommes ont été arrêtés après avoir peint des graffitis anti-anglophones sur les murs de l'ancien hôtel de ville de Baie d'Urfé. Les vandales, âgés de 20 à 50 ans, ont inscrit les lettres " FLQ " et différents messages hostiles aux anglophones sur l'édifice. Ils auraient aussi eu l'intention de scier le mât qui soutient le drapeau du Canada. Ces individus comparaîtront mardi. Ils feront face à des accusations de méfaits, de complot et d'utilisation d'explosifs. Les policiers ont saisi trois bombes artisanales sur les suspects."
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Le 5 octobre 1961, le maire de Baie d'Urfé et son épouse vinrent dans le Forez visiter entre autres lieux les Cornes d'Urfé, Saint-Germain-Laval, la Bastie d'Urfé et la Diana à Montbrison. Le couple était accompagné notamment par Marius Delomier, administrateur de la Bâtie d'Urfé et Jean Bruel, secrétaire de la Diana. M. Collavéri avait alors quitté le Forez pour l'Algérie où il était inspecteur général de la province de Constantine. Il continua à entretenir une correspondance très suivie avec la Diana. Un journal de langue anglaise, The Lakeshore News, donna un large écho à cette visite.
Mais revenons à notre Sulpicien. On sait peu de choses sur ses années passées en Amérique avant 1685 sinon qu'il y débarqua en 1668 en compagnie de trois autre frères: MM. Quélus, comme Supérieur de la communauté, Dalleck (ou Dallet) et Gallinée. Soit un an après le célèbre explorateur René Robert Cavelier de La Salle qui avait pour frère, également expatrié, Jean Cavelier de La Salle, un autre prêtre de Saint Sulpice.
François-Saturnin d'Urfé y resta jusqu'en 1674, revint en France, y retourna de 1676 à 1677. D'après Armand Yon, dans Les Prêtres de Saint-Sulpice au Canada: grandes figures de leur histoire (publications de l' Université Laval) il passa quatre ans au contact des Iroquois dans la mission de Kenté (Quinté), au lac Ontario. C'est l'abbé François Salignac de la Mothe-Fénelon, le demi-frère de l'illustre archevêque de Cambrai, qui l'y avait amené en 1669. Il s'agit évidemment d'apporter la parole évangélique aux sauvages.
On en apprend plus sur les aventures du missionnaire dans l'abrégé de la mission de Kenté qui figure dans L'Histoire du Montréal (parce que Mont Royal) de Dollier de Casson. Celui-ci, en fait, rapporte ce qu'une des "robes noires" de la mission -ainsi les indiens les appelaient-ils - M. Trouvé, lui a raconté. Celui-ci s'attarde surtout sur les mésaventures de M. Durfé (ainsi orthographié).
Notre homme un soir, après avoir dit la Sainte Messe, "alla faire son action de grâce dans le bois" et s'y égare. Il passe le jour et la nuit à chercher son chemin "sans le pouvoir trouver et après enfin il fut obligé de se reposer, ce qu'il fit dans une attrape à loup qu'un sauvage avait fait, il y a déjà quelques temps... " Finalement il retrouva son chemin, après s'être recommandé à la protection de M. Ollier, le fondateur de la Compagnie. A son retour, les Iroquois lui firent fête, remerciant L'Esprit de ce qu'il n'était pas mort dans le bois. En 1671, Durfé toujours, "pensa périr dans une autre disgrâce que fut que venant au Montréal son canot tourna sous voile d'un gros vent arrière, au milieu du fleuve, mais quasi par bonheur encore qu'il ne sut point nager, Dieu le préserva..."
Une autre péripétie le met en scène non loin d'un village nommé Ganeraské où il découvre une femme en proie aux douleurs de l'enfantement. "Or comme ces pauvres sauvagesses sont extrêmement honteuses quand elles sont dans cet état lorsqu'il y a des étrangers, cette pauvre femme se résolut sans en rien dire d'aller dehors sur les neiges pour enfanter, quoique dans la plus grande rigueur de l'hiver. " Le religieux revint deux jours plus tard. " Il trouva cette accouchée bien mal, les sauvagesses, lui dirent que depuis son départ, elle avait eu encore un autre enfant et qu'elle perdait tout son sang ; trois quarts d'heure après, la malade criait à haute voix à quelqu'une de ses compagnes " donne moi de l'eau" et elle mourut au même instant, aussitôt après, celles qui l'assistaient la poussèrent dans un coin de la cabane comme une bûche et jetèrent auprès d'elle ses deux enfants, tous vivants qu'ils étaient, pour être dès le lendemain enterrés avec leur mère." Il baptisa les enfants juste à temps. Un mourut. Et il sauva l'autre, une deuxième fois, qui allait être enterré vivant avec sa pauvre mère. Ce ne fut qu'un répit.
"(...) il était allé chercher une nourrice, il le fit en vain, car les sauvagesses par une superstition étrange ne voudraient pas pour quoique ce soit au monde allaiter un enfant d'une décédée. Ce missionnaire revenant voir son orphelin, il le trouva mort au monde et vivant à l'éternité..."
Sur l'Iroquois dont Chateaubriand a fait "le Spartiate de l'Amérique du Nord" et qui, d'après un autre auteur, biographe de La Salle, avait sur le continent "les mêmes prétentions que le Romain sur l'ancien monde", surnommé même par les Jésuites le "démon de la destruction", sur l'Iroquois donc, d'Urfé pourrait avoir livré un témoignage ethnologique. C'est l'hypothèse avancée dans un Bulletin de la Diana (2004) à propos d'un texte conservé à la Bibliothèque Mazarine. Rien n'est moins sûr. Le texte, s'il émane certainement d'un membre sulpicien, n'est pas signé et ne contient aucune information probante pouvant le rattacher à d'Urfé. Cet Abrégé des vies et moeurs et autres particularitez de la Nation Irokoise, décrit certains us et coutumes de ces indiens qui formaient une confédération de cinq nations: les Onéidas, Onondagas, Cayugas, Sénécas et Mohawks. L'auteur écrit notamment que "la nation Irokoise est celle de tous les sauvages la plus belliqueuse et si le François ne s'était point étably dans ce pais il ne fait pas douter qu'ils ne se fussent rendus les maîtres de toutes les autres nations..." Il évoque les tourments qu'ils font subir à leurs prisonniers tout en relevant que "de toutes les nations (...) il n'y a que le Huron qui les surpasse pour l'esprit". Des femmes, il indique qu'elles sont "très peu sensibles au mal (la douleur, ndlr)".
Les armes de Baie d'Urfé. Il s'agit du blason de la famille d'Urfé, bien connu en Forez, "de vair au chef de gueules" avec la couronne d'épines du Christ et la couronne du marquisat qui rappelle le titre de notre homme, marquis de Baugé. Une ville limitrophe, Sainte-Anne-de-Bellevue (fondée elle en 1818), porte aussi sur ses armoiries le vair du blason d'Urfé, qui recouvre une croix.
En 1673, Louis de Frontenac, gouverneur de la Nouvelle France, nommé un an plus tôt par Louis XIV, organise une expédition. A la tête d'une forte troupe en armes, il prend le chemin de Montréal à Lachine (évoquée plus haut) sur la pointe de l'île où tout le monde embarque sur les canots (plus d'une centaine). Entre-temps, Frontenac a fait convier les chefs des Cinq-Nations pour une grande assemblée à Kenté. Il s'agit d'impressionner les Indiens qui sont nos alliés mais chez lesquels intriguent les Anglais et les Hollandais, qui aimeraient détourner à leur profit le commerce des fourrures, et les incitent à la guerre. Elle éclatera dans les années 1680 marquées par la tuerie de Baie d'Urfé et surtout, deux ans plus tard, le massacre de Lachine. 1500 guerriers déferlèrent sur la colonie. Des dizaines de Français furent massacrés et d'autres emmenés en captivité, qu'on ne revit jamais. Dans les guerres contre les Français, jusqu'à la chute de Québec, les Iroquois se rangèrent du côté anglais. Ce fut encore le cas pendant la guerre d'Indépendance américaine.
Jacques Grasset de Saint-Sauveur, Encyclopédie des voyages : contenant l'abrégé historique des moeurs, usages, habitudes domestiques, religions, fêtes, supplices, funérailles, sciences, arts, et commerce de tous les peuples, et la collection complette de leurs habillemens civils, militaires, religieux et dignitaires dessinés d'après nature. Gravés avec soin, et coloriés à l'aquarelle par J. Gra, Deroy, Paris 1796
Pour l'heure, Frontenac reprend à son compte une idée de M. de Courcelle qui consiste à établir sur le lac Ontario un fort, en même temps qu'un poste de traite, pour y asseoir son autorité. Si Frontenac avait semble-t-il songé, assez logiquement, à établir le fort à Kenté, La Salle lui fit comprendre que la position la plus avantageuse était celle où le Saint-Laurent s'échappe du lac. Et c'est là qu'eut lieu finalement la grande assemblée avec les chefs iroquois que les abbés Fénelon et d'Urfé s'en allèrent chercher en hâte à Kenté. A cet emplacement fut élevé le fort Cataracoui, autrement nommé "fort Frontenac" en hommage au gouverneur et dont La Salle prit le commandement avant de le recevoir du Roi à titre de seigneurie. C'est aujourd'hui une ville: Kingston.
Dans les mois qui suivirent, notre abbé joua aussi son rôle dans les démêlés entre le gouverneur Frontenac et diverses personnalités au premier rang desquelles François-Marie Perrot et l'abbé Fénelon. Le premier, gouverneur de Montréal, négociant en fourrure, avait établi un poste de traite et employait "des coureurs de bois pour devancer de la sorte les trafiquants de fourrures de Montréal", bien que "les édits royaux régissant la traite des fourrures [eussent interdit] de telles entreprises " (W.J. Eccles). Lorsque Frontenac établit son poste de traite, les commerçants de Montréal y virent une menace bien plus grande pour leurs intérêts et s'unirent à Perrot contre Frontenac. Lequel avait commis quelques erreurs en établissant dans le Nouveau Monde certaines pratiques du vieux continent, telle une corvée un peu trop pesante, en oubliant que partie de la population était déjà canadienne et plus tout à fait française. Ces coureurs des bois par exemple, chasseurs libres et intrépides qui se fondent dans le paysage, souvent épousent des indiennes - c'est bien là un trait de caractère français d'ailleurs. Le caractère anglais s'accommode moins de ces fantaisies. Bref, Frontenac fait emprisonner Perrot et le remplace par un de ses hommes. En violation du Droit des Sulpiciens, seigneurs de l'île de Montréal. Et l'abbé Fénelon, en chaire, fait un sermon vite interprété par les fidèles de Frontenac contre une attaque en règle contre le gouverneur. Fénelon est donc cité en justice. D'Urfé le défend et en 1674 s'embarque avec lui pour la France. Perrot rentre aussi. Bénéficiant de la protection de Colbert, n'ayant rien à se reprocher, d'Urfé reviendra comme on l'a vu, au Québec. Mais Fénelon jamais. Perrot fut embastillé trois mois et Frontenac, qui avait pris trop de liberté, sanctionné. La "zizanie", pour reprendre l'expression de Jacques Lacoursière dans son Histoire populaire du Québec, allait se poursuivre jusqu'à son rappel en France en 1682. Il revint sept ans plus tard pour faire la guerre aux Anglais.
On s'éloigne un peu des temps héroà¯ques de Marquette et autre Jolliet mais avant de nous intéresser à deux explorateurs foréziens, un mot au passage sur sept hommes d'Eglise foréziens qui sont allés vivre leur foi en Amérique du Nord et exercer un sacerdoce élevé :
-Michel Portier, de Montbrison, dirigea son diocèse de Mobile (Alabama) durant 33 ans (1826-1859).
-Antoine Blanc, né à Sury le Comtal en 1792, fut nommé archevêque de la Nouvelle-Orléans en 1835. Son successeur fut Jean-Marie Odin, originaire d'Ambierle. Auparavant, ce dernier fut également évêque de Galveston.
-Claude-Marie Dubuis, né à Coutouvre, fut nommé vicaire apostolique du Texas en 1862, se retira en 1882 et décéda en 1885.
-Antoine Durier, de Saint-Bonnet-des-Quarts (La Pacaudière) fut évêque d'Alexandria (Louisiane) en 1885.
-Le Stéphanois Henri Granjon fut pour sa part élevé au rang d'évêque de Tucson (Arizona) en 1900.
-Jean-Baptiste Pitaval, de Saint-Genis-Terrenoire fut nommé archevêque de Santa-Fé au Nouveau Mexique en 1909.
A peu près au moment où François d'Urfé retournait en France, Daniel Greysolon, sieur Duluth (ou Du Luth) revenait au Québec (qu'il connaissait déjà ) cette fois avec son frère Claude Greysolon, sieur de La Tourette.
La maison natale de Daniel Greysolon Duluth (ou Du Luth) se trouve dans la Loire, à Saint-Germain-Laval. Une inscription dans la pierre aujourd'hui presque effacée précise l'année de sa naissance: 1636. On lit parfois 1639. Il s'est éteint en 1710 à Montréal où une avenue garde le souvenir de son nom. Sur son lieu de naissance, on trouve parfois la mention de Lyon. En 1951, Antoine d'Eschambault dans La vie aventureuse de Daniel Greysolon, sieur Dulhut (Revue d'histoire de l'Amérique française) le faisait encore venir au monde à Saint-Germain-en-Laye tout en précisant la souche forézienne de la famille.
Nous sommes deux ans après l'inauguration du petit monument qui concluait la démarche engagée par le maire de Baie d'Urfé. Mais cette fois, la missive avait fait le voyage inverse, de France vers l'Amérique.
Le sieur Duluth (sculpture de Jacques Lipchitz, Université du Minnesota, photo: Sarra Vinik)

Parmi les tribus qui peuplent les rives des Grands Lacs citons les Outaouais (ou Ottawas, traditionnellement alliés aux Français et qui auront pour chef, quelques décennies plus tard, le célèbre Pontiac), les Cris et les Ojibwés. Ce sont ces derniers qui sont appelés par les Français Sauteux (Saulteux, Saulteurs) en référence à Sault Sainte Marie, le lieu où, sept ans plus tôt, Simon François Daumont de Saint-Lusson, au cours d'une cérémonie, au nom du Roi, a pris possession de la région des Grands Lacs. Il y a surtout les Sioux, sur la façade occidentale du Lac Supérieur, le haut Mississipi où le grand fleuve prend sa source, au lac Itasca. Source dont Greysolon du Luth n'est pas le découvreur comme l'indique à tort l'hommage gravé sur la pierre de Saint-Germain Laval. C'est ce pays des Sioux, pratiquement terra incognita, que Duluth veut visiter.
Par ailleurs, dans une région très riche en fourrures, les conflits incessants que se livrent les tribus ne font pas les affaires des Français. Et profitent aux Anglais. "Si quelques François n'estoient allez au Nord, à la fin de l'année dernière, tous les sauvages dudit lieu auroient porté les pelleteries à la baye d'Hudson", écrit Du Luth à Frontenac en 1679. Il semble aussi avoir profité de son expédition pour faire la traite, ce qui lui attira les foudres du gouverneur Duchesnau et de Cavelier de la Salle qui le traitèrent de "coureur de bois", parfois même au bénéfice des Anglais. Accusation dont il devra se défendre en France auprès du ministre Seignelay et dont il sera lavé. Mais l'étiquette de "coureur des bois", péjorative car synonyme de renégat à l'autorité royale, lui restera, ce que déplorait dans les années 60 le bon docteur Boël dans un entretien avec Dunn. Il estimait que l'Histoire avait été injuste avec le Forézien, toujours à courir dans les forêts, à combattre et à explorer. Certains historiens pourtant, ainsi Francis Parkman (1823 - 1893), lui avaient rendu hommage, saluant sa hardiesse et en faisant de lui presque l'égal de La Salle.

Mais voici le récit de frère Robert : " Le 15 septembre 1679, du Luth envoya des messagers à toutes les nations sauvages de l'ouest, leur donnant rendez-vous pour l'hiver suivant à l'endroit où s'élève aujourd'hui la ville de Duluth. Les délégués vinrent de loin, "fourrés comme des ours"; aussitôt arrivés, ils présentaient leurs hommages à du Luth. "Ce collier contient ma parole, disait un chef puissant, et j'assure que l'orignal pressé de la soif ne désire pas avec plus d'ardeur l'eau des rivières que je ne désire enterrer pour jamais les flèches et la hache".
Vint la réunion plénière. Les délégués, rassemblés dans une grande hutte, s'assirent en cercle sur leurs talons, du Luth tenant la place d'honneur; on plaça au centre le calumet, sorte de vase en pierre rouge, orné de plumes et muni d'un tube de quatre à cinq pieds.
Les sauvages, les yeux fixés à terre, quelques-uns fumant par petites bouffées, gardèrent un silence presque complet. A peine si, de temps en temps, une de ces figures impassibles, prononçait une parole; puis l'on n'entendait que le crépitement du feu.
La première séance terminée, il restait aux sauvages à délibérer entre eux. Ces conseils secrets durèrent quelques jours, mais du Luth connut à l'avance que les décisions seraient favorables à sa cause.
Lors de la réunion finale, un jeune homme illustre par sa force et ses ruses, ayant déjà tué cinq ennemis dans le combat, éleva la voix, disant : "Je ne suis pas un homme de conseil, j'écoute ordinairement les anciens, voici la paix. Ononthio tu as sans doute beaucoup de joie de voir ici tous ces peuples autour de toi: toute la terre est devant toi pour faire un grand amas de haches; sache que le premier qui la lèvera contre toi, nous la lèverons tous contre lui. Enterrons la hache et le bouclier, et faisons passer une rivière par dessus. Nous ne donnerons nos fourrures qu'aux Français nos alliés.
Le calumet passa de bouche en bouche, chacun lançant une bouffée vers le soleil, en témoignage de ses bonnes intentions. La paix était faite."
Il repartit en expédition en 1683, pour trois années. Au cours de celle-ci, il fait exécuter deux guerriers indiens qui avaient tué deux Français. Il participa à la construction de forts et leva des contingents indiens pour faire la guerre au nom du Roy. Perclus de goutte - il aurait été un temps soulagé par l'intercession de la Bienheureuse Kateri Tekakwitha, la (Sainte) Iroquoise, décédée en 1680 - Duluth se retira à Montréal où il passa les dernières années de sa vie. L'aventurier - " l'une des figures les plus sympathiques des temps héroà¯ques de la Nouvelle-France" comme l'écrit Frère Robert - fut inhumé dans la chapelle des Récollets.
De son frère, Claude Greysolon de La Tourette, on sait peu de choses sinon qu'il participa à l'expédition de 1683, avec Duluth. Il fut chargé de diriger les postes que son frère fonda au lac Nipigon et à Kaministiquia, lisons-nous sur le dictionnaire biographique du Canada en ligne. Il n'aurait pas participé à celle de 1678 (lire).
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