3e volet de notre série consacrée aux architectures stéphanoises, après "Architextures étroites" et "Architextures studieuses".
Le cours Fauriel se veut dès le début de sa création, en 1856, comme un boulevard urbain nécessaire à l’expansion industrielle de Saint-Étienne, et comme une large promenade pour l’agrément et « l’hygiène » de la population. Son aménagement prend fin en 1865. Surnommé parfois, un peu pompeusement, « les Champs-Élysées » stéphanois, le cours s’étend sur deux km entre la place Villeboeuf et le Rond-Point, aménagé en 1935 ; le viaduc et le tunnel étant construits en 1968. Sur le plan architectural, le côté droit (numéros pairs) est plutôt marqué par des bâtiments au style classique ou d’un « modernisme mesuré » ; quant au côté gauche (numéros impairs), il est constitué essentiellement de massifs immeubles modernes et des vestiges rénovés de « Manufrance ». Il s’agit ici de présenter quelques constructions plus ou moins emblématiques de cette avenue, et du Rond-Point, dont certaines ont été marquées par l’aventure industrielle stéphanoise, en particulier la fabrication des armes.
Bâtiments industriels
Atelier urbain / Inconnu, 1926 /n°19
M. Verney-Carron, qui gère l’entreprise familiale créée en 1820, ouvre une véritable usine de fabrication de fusils aux 17/19 du cours Fauriel. L’atelier est abandonné dans les années 1970. Resté intact avec sa verrière, il a été réhabilité sans modification de sa structure par l’agence de communication qui l’occupe.
Usine Darne / Thomas Javit, 1906 / n°71
Un bâtiment assez imposant, qui conserve sa façade d’origine avec ses pilastres ioniques et ses puissantes enseignes. Sa construction a été voulue par Régis Darne, armurier depuis 1881, qui y développe une fabrication mécanique en grand à partir de 1906, avec plus de 60 salariés. Figure de l’armurerie Stéphanoise, Darne, réputée pour ses fusils de chasse de grande classe, a fabriqué aussi des mitrailleuses pour l'aviation, 3266 mitrailleuses durant le premier conflit mondial et quelque 11 000 autres de 1918 au milieu des années 1930. L’entreprise existe toujours sous le nom de "Société Nouvelle des Armes Darne". Elle est installée rue de la Convention.
Ex-siège d’entreprise / Eric Freynet, 1897 / n°52
Ce bâtiment a abrité le siège de la fabrique d’armes Humbert, créée en 1881 (les ateliers se situant sur l’arrière, rue Charles Rebour). Son style, plutôt classique, joue avec la polychromie de la brique et de la pierre. Quelques motifs décoratifs viennent agrémenter le fronton du haut. L’entreprise, associée à Beretta depuis 2001, est aujourd’hui implantée à Veauche. On se souviendra que le groupe italien et sa filiale française avaient déposé, en vain, un dossier de candidature pour la fabrication du fusil d'assaut devant remplacer le fameux Famas.
Ex-brasserie du Rond-Point / Inconnu, 1880 / n° 168
Le site de l’ancienne « Brasserie Nationale » au Rond-Point, bâtiment emblématique de style austro-hongrois, accueille alors la plus grosse brasserie de la région, et dans les années 1920, parfois des messes, tout comme il sait se transformer en dancing. De 1953 à 1991, il devint une maternité, la Clinique Eyraud. La « Maison Farinër », boulangerie/pâtisserie, s’y installe en 1999.
Ex-Manufrance / Léon Lamaizière, 1893-1916 et Cimaise architectes, 1993-2004 /n° 49-51
Les bâtiments de la Manufacture française d’armes et cycles, créée en 1885 par Mimard et Blachon, qui bordent le cours sont ceux de l’administration. Leurs façades les font dénommer « palais industriel ». On note ici les escaliers monumentaux et les pilastres (colonnes encastrées) qui encadrent, entre autres, l’ouverture centrale au fier fronton. Manufrance est mise en liquidation judiciaire en 1979 et les locaux sont réhabilités à partir de 1993. Aujourd’hui, ils abritent notamment une école de commerce.
L’ancienne « usine à étages » se trouve alignée à l’arrière du cours Fauriel, avec le sigle « MF « au fronton. Il s’y trouve un pôle tertiaire, avec le Centre des congrès, une annexe de l’Ecole des mines et des bureaux.
Autres bâtiments
La Rotonde / Louis Vendange, 1973 /n° 158
Ce bâtiment, d’une forme circulaire montée sur pilotis, est construit en béton préfabriqué dans le cadre de la phase d’agrandissement des locaux de l’Ecole des Mines, entre 1969 et 1975. Après avoir hébergé un centre de calcul informatique, il accueille, depuis 1999, le Centre de médiation culturelle, scientifique, technique et industrielle (CCSTI) qui porte son nom.
Ecole des Mines / Joseph Bernard, 1927 /n° 158
Ce bâtiment en U est de style néo-classique. On trouve ici un aperçu de la façade principale, avec ses colonnes doriques, et ses sculptures (fronton, atlantes qui supportent le balcon, statues dans les niches) qui symbolisent la mine, la métallurgie et la science. Les noms gravés sont ceux des anciens élèves, professeurs et directeurs de renom.
Maison / Michel Poncet, 1930 / n° 21
Un petit immeuble étonnant, au fronton orné d’un imposant cartouche encadré de bas-reliefs, et dont la conception de façade s’avère assez soignée : oeils de bœuf au troisième niveau, ferronneries des garde-corps, bow-window central, colonnes encadrant les ouvertures de la travée de gauche.
Immeuble / Henri Rispal, 1900 /n° 104
Un immeuble flanqué à l’angle de deux balcons aux garde-corps bombés et, sur la gauche, d’un large balcon et d’une vaste véranda au deuxième étage. Son rez de chaussée abrite aujourd’hui un restaurant et un pressing.
Le Rond-Point
Immeuble David / Léon Lamaizière, 1898 / 1, allée du Rond-Point
En 1896, les industriels rubaniers David confient la conception de cet immeuble de rapport à Léon Lamaizière. Une véranda et un solarium y sont ajoutés sur la droite en 1928. La façade est rythmée par l’alternance des fenêtres et des balcons, avec leurs balustres en pierre ou en fer forgé, ainsi que par le jeu entre la pierre blanche et la brique.
Bâtiment / Inconnu, années 1900 / 32 rue Emile Clermont
Un petit bâtiment bourgeois, de style classique, marqué par des touches décoratives en briques polychromes, et par un fronton courbe et un cartouche majestueux. Entièrement rénové en 2009, il accueille désormais le restaurant « La Bâtisse ».
Nota : en remontant le bas du cours, après l’école, on trouve un autre immeuble de Rispal (au n° 22 / 1908), deux immeubles de Subit et Gouyon (au n° 44, 1920 et au n° 48/48bis, 1922), et trois immeubles de Ligonnet (au n° 58, 1908, au n° 66, 1900 et au n° 68, 1908).
Sources : Archives municipales de Saint-Étienne ; Coll., Les Lamaizière architectes à Saint-Étienne 1880-1925, Publications de l’université de Saint-Étienne, 1995 ; Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Étienne ; Forez Info ; Google Street View ; La Montagne ; mediatheques.saint-etienne.fr ; patrimoine.rhonalpes.fr ; pss-archi.eu ; Sociétés : Darne, Farinër, Humbert, La Bâtisse, Verney-Carron ; Wikipédia.