Monday, December 04, 2023
Une balade tranquille et forestière, à Planfoy et Saint-Genest-Malifaux, dans un bois qui nous avait déjà  accueillis pour notre flânerie autour de la Croix du Trève (lire). Nous allons cette fois nous écarter davantage de ce carrefour.

 

LA TOURBIERE DES VERNELS

Au carrefour de la Croix du Trève nous prenons l'ancien chemin muletier qui se dirige vers le sud-est, sur la République. 800 m plus loin nous sortons du bois pour aborder, au terme d'une large courbe, la tourbière des Vernels. Une tourbière est un milieu naturel très particulier. C'était à  l'origine un petit lac, qui a été colonisé par des plantes spécifiques, des sphaignes en particulier, capables de « pomper » des quantités d'eau phénoménales. L'humidité empêchant les végétaux morts de se décomposer, ceux-ci forment au fil du temps une épaisse couche de tourbe qui peu à  peu comblera le lac, et sur laquelle se développeront d'autres végétaux typiques, tels que les droséras, plantes dites « carnivores », et des linaigrettes aux délicats plumets cotonneux. La tourbière des Vernels bénéficie de panneaux didactiques, mis en place par le Parc Naturel Régional du Pilat, rappelant les conditions de vie de cet environnement étrange. C'est un lieu calme, propice au repos, et avec beaucoup de patience vous apercevrez peut-être quelques uns des habitants typiques de ce milieu : une vipère péliade se chauffant au soleil sur une butte sèche, un lézard vivipare, une cordulie arctique, libellule noire que l'on trouve plus habituellement dans les pays froids mais qui s'est adaptée aux tourbières de nos régions.

Photos: la Droséra, une fleur communes des tourbières. Avec l'aimable autorisation de Mr Jean-Louis Cheype. Et l'élégante et délicate cordulie.

 


Revenir à  la « civilisation » des pique-niqueurs qui s'agglutinent autour du carrefour du Trève, après cette immersion hors du temps, serait trop brutal. Aussi nous allons poursuivre sur le même sentier, passer devant la belle ferme de Bel-Air, typique des hauts plateaux, prendre à  droite le chemin traversant le hameau d'Epagne, en admirant au passage ce tilleul qui a « posé ses fesses » sur un rocher bordant le chemin. Nous continuons tout droit pour déboucher, après avoir traversé le bien nommé Bois Rond (devenu Boirond sur les cartes ?), en vue d'un étang allongé et selon toute évidence artificiel.



Le chemin muletier à  Bel-Air


LES GLACIERES

Un coup d'oeil à  la carte, nous sommes aux Glacières. Au début du XXe siècle, et jusque dans les années 1920, la glace qui se formait sur les étangs en hiver était découpée, débitée en pains, entreposée dans des abris en pierre, où elle se conservait jusqu'à  l'été. Elle était alors livrée à  Saint-Etienne, destinée aux cafetiers, hôpitaux, etc. Puis cette activité sera couplée avec celle de la production laitière, mise en place sur les hauts plateaux par le baron Louis Courbon et la famille Courbon-Lafaye. La laiterie coopérative des Glacières organise la distribution du lait dans le bassin stéphanois, abandonnant le site des Glacières, dont elle ne gardera que le nom, pour ouvrir dans les années cinquante la Laiterie des Glacières à  Saint-Etienne. En 1964, cette coopérative se fond, avec d'autres laiteries de la région Rhône-Alpes, dans une société fabricant des produits laitiers nés de la fusion de Yola et Coplait, les marques précédemment exploitées, désormais commercialisés sous une marque bien connue : Yoplait.



Après cette évocation de l'histoire économique des Glacières, c'est avec un certain goût de yaourt dans la bouche que nous quittons les lieux pour rejoindre la D 501, que nous ne ferons que traverser pour poursuivre par la petite route en face.


LE CHATEAU DE PERUSEL


Dans la montée, la vue se dégage à  droite sur un beau manoir, qui avec ses tours coiffées de toits pointus semble sorti tout droit d'un conte de fées. Inspiré des châteaux de la Loire, mais de bien plus modestes dimensions, voici le château de Pérusel. Il ne date que de 1858, et a été construit par la famille Courbon, qui l'occupa jusque dans les années 1930. Le nom Pérusel indique semble-t-il un lieu où abondaient les poiriers sauvages. Le château s'élève sur un terre-plein joliment exposé, adossé à  la colline qui le protège du vent du nord. On dit que c'est l'épouse du baron Courbon qui, de la pointe de son ombrelle, dessina le tracé du futur château sur le sol. C'est aujourd'hui un centre médico-social pour enfants.


Nous passons entre le château et sa ferme, et poursuivons par un chemin qui rejoint l'ancienne route de Saint-Genest-Malifaux. Par la gauche nous pourrions atteindre rapidement la Croix Verte et son aire de pique-nique, puis Magnoloux, qui offre une si belle vue sur le Mézenc et autres montagnes du Velay ou du Vivarais. Mais nous allons tourner à  droite pour revenir à  la Croix du Trève, par cette belle piste forestière fréquentée par les amateurs de chanterelles grises, puis par un sentier parallèle à  la route départementale, mais curieusement absent sur la carte. Nous sommes dans le Bois Farost, un nom que le poète local Louis Jacquemin assimilait aux pharaons d'Egypte, et où il situait une bataille légendaire menée par Hercule et ses soldats gaulois. Au-delà  de la vision poétique se cache sans doute le souvenir d'un combat antique. Le poète aimait aussi à  vanter les charmes de la Font-Ria, une source sacrée toute proche du carrefour, sur laquelle nous nous sommes déjà  longuement penchés lors de notre flânerie autour de la Croix du Trève.