La plaque a été dévoilée le 22 décembre 2010, à deux pas du futur Jardin du Regard, non loin de l'Esplanade de France. Maurice Vincent a salué en La Fayette "l'homme de la liberté" et "un personnage historique de grande ampleur". Il " mérite d'être connu dans les différents aspects de son parcours", a-t-il souligné.
Plusieurs membres de l'association de l'Ordre La Fayette étaient présents, de même que deux descendantes du célèbre marquis. Geneviève Aubert-La Fayette avait fait le déplacement depuis le château de Vollore, dans le Puy-de-Dôme. Sa cousine, Geneviève de La Pomelie est la présidente du Cercle des Amis de La Fayette. Créé en 1989, il s'est donné pour objectif de perpétuer la mémoire de son aieul, homme politique et soldat, principalement connu pour son rôle dans les évènements de la Révolution française et son action durant ce que nous nommons en France la Guerre d'indépendance américaine.
La municipalité de Langeac était représentée (La Fayette était aussi seigneur de Langeac, en Haute-Loire) ainsi que le consul des Etats-Unis.
La frégate l'Hermione, le bateau sur lequel il a embarqué en 1780, est reconstruite à Rochefort depuis 1997. La mise à flots est prévue pour 2012.

>> L'article qui suit, "Des armes pour l'Amérique", a été écrit en 2006 dans de drôles de circonstances, au départ de bribes récoltées auprès d'un monsieur rencontré par hasard et que cette histoire fascinait. Au besoin: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
AMERICA !
On connaît les mots fameux, parfois attribués au général Pershing et qui ont été prononcés à l'occasion de l'entrée en guerre des Etats-Unis d'Amérique aux côtés de la France en 1917: "Lafayette nous voilà !" Personnage complexe, contesté en France pour son action dans les évènements de la Révolution, le marquis reste Outre-Atlantique le grand homme français. Près de 40 villes américaines portent son nom ! Et rares sont les villes qui n'ont pas leur square, leur rue ou leur hall Lafayette. Il est né en Haute-Loire le 6 septembre 1757 dans le château de Chavaniac et le village, comme de nombreuses villes US, fête cette année son héros des deux mondes.

"La Liberté" à Saint-Etienne
Quand Silas Deane arrive à Paris en avril 1776, la guerre d'indépendance américaine a débuté il y a un an avec la bataille de Lexington. Celle-ci, le 19 avril 1775, a vu les Insurgents battre les forces britanniques, obligées de se replier sur Boston. Silas Deane (1737-1789) est un négociant fortuné délégué en France par le jeune Congrès américain avec une double mission: acheter, si possible à crédit, des armes, munitions et équipements pour les soldats de l'armée continentale et explorer les possibilités d'une alliance en bonne et due forme avec Versailles. L'opinion en France est assez favorable à une telle entreprise. La nouvelle de l'insurrection américaine est en effet accueillie avec sympathie puisqu'elle se fait contre l'ennemi héréditaire en même temps qu'elle s'inscrit dans les idées philosophiques qui se propagent et qui, quelques années plus tard, amorceront la Révolution française.
Les évènements américains cependant, et pour les mêmes raisons, inquiètent le Trône de France qui tergiverse. Mais dans l'ombre, depuis longtemps déjà , s'agitent les agents secrets et les diplomates. Il y a notamment le comte de Broglie, ancien chef du "Secret du roi" sous Louis XV et qui depuis la défaite de la Guerre de sept ans face aux Anglais - qui vit en 1763 la perte de Québec - n'eut de cesse de venger l'affront. Dès 1768, il avait dépêché Johann de Kalb dans les colonies anglaises avec pour mission de sonder les sentiments des colons américains envers la couronne britannique. Le rapport de son agent était sans équivoque: tôt ou tard, la guerre aura lieu. Peu de temps après Lexington, le comte de Vergennes, ministre des affaires étrangères, avait envoyé à Philadelphie Achard de Bonvouloir afin d'assurer les colons de la sympathie de la France. Il y surtout Pierre-augustin Caron de Beaumarchais, l'auteur du Mariage de Figaro, qui est un des plus fervents défenseurs de la cause américaine et qui rencontre à de nombreuses reprises Arthur Lee, un autre député secret américain.

Mousquet modèle 1766 dit " le Charleville"
150 000 armes de ce type furent fabriquées dans les arsenaux français entre 1766 et 1769. L'armurier Honoré Blanc a composé ce modèle à Saint-Etienne puis celui de 1777 (lire plus loin).
Mais il faut des armes, un appui plus conséquent de la part de la France qui a déjà ouvert ses ports aux corsaires américains. En juin 1776, un mois avant la Déclaration d'Indépendance, Beaumarchais reçoit du comte de Vergennes et du roi Louis XVI l'autorisation de vendre aux Insurgents poudre et munitions pour près d'un million de livres tournois. Mais officiellement, la France n'est pas en guerre contre l'Angleterre; aussi, c'est sous le couvert d'une compagnie maritime fictive, la fameuse compagnie portugaise Rodrigue Hortalez et Compagnie, que les armes sont acheminées vers le Nouveau-Monde, via les Indes occidentales parfois.

Médaille du graveur stéphanois Augustin Dupré, revers de "Americana Libertas" ou la France en habit d'Athéna défendant de son bouclier fleurdelysé la jeune République américaine contre le léopard anglais.
C'est là qu'intervient un mystérieux personnage de Saint-Etienne qui porte pourtant un patronyme bien connu dans notre ville. Son nom est Jean-Joseph Carrier de Monthieu. Issu d'une famille de négociants d'armes, il est au début des années 1760 le plus important des neuf entrepreneurs se disputant à Saint-Etienne le marché de la production d'armes. Ils sont regroupés en 1764 dans une société unique nommée Manufacture royale d'armes. Cette société, dont l'instauration fut impulsée par M. de Montbeillard, ancien inspecteur de la Manufacture de Charleville, reçoit du roi Louis XV l'autorisation de produire des armes de guerre au même titre que la manufacture ardennoise. Disposant d'ateliers et de magasins rue des Rives à Chavanelle, elle s'engage à fabriquer des armes soigneusement contrôlées et les conditions de travail sont réglementées. La production d'armes de guerre passe de 3 000 à 20 000. On y débute aussi la fabrication des baionnettes que l'on recevait auparavant de Klingenthal.

Yorktown, les tuniques rouges se rendent aux Américains et aux Français
En 1769, la Société se disloque et Monthieu devient l'unique entrepreneur. C'est lui qui, associé à Beaumarchais et à d'autres, notamment un armateur nantais du nom de Pelletier-Dudoyer, fournit à Rodrigue et Hortalez et Cie une partie des armes destinées aux Insurgents. Grâce à cette aide d'une ampleur considérable (30 000 fusils "Charleville", poudre à canon...) les Américains remportent en septembre 1777 la bataille de Saratoga, le tournant du conflit, alors que Benjamin Franklin est en France, créant ainsi les conditions d'une alliance ouverte avec la France, en février 1778. Le corps expéditionnaire français débarque en 1780. Le 19 octobre 1781, Cornwallis capitule à Yorktown (où 11 000 soldats français ont combattu) et scelle le sort de la présence britannique.
HONORE BLANC ET LE M1777
Fusil français modèle 1777 (/dr). La fabrication des platines de fusils M1816 de l'arsenal US de Springfield s'est appuyée sur ce modèle. Dès 1785, l'ambassadeur des Etats-Unis, le célèbre Thomas Jefferson, avait alerté le ministère de la guerre de son pays de l'intérêt du travail de l'armurier stéphanois (/dr)
Ce fusil résulte de la longue évolution d'une arme destinée à remplacer les fusils de modèles pour le moins variés que les soldats Français employaient au combat. Son histoire est liée à un nom célèbre de l'histoire militaire française: Gribeauval. Ce-dernier est surtout connu pour le canon qui porte son nom et qui donna aux armées de la République et de l'Empire une supériorité certaine. Avec Blanc, il tenta d'appliquer avec cette arme les principes de simplification des mécanismes, l'interchangeabilité des pièces de la platine et leur standardisation. Honoré Blanc, à Saint-Etienne en 1783, tenta les premières applications industrielles afin de produire les armes plus rapidement et de réaliser des économies en " remplaçant l'homme habile par la machine infaillible". Mais devant l'hostilité des armuriers stéphanois, il installa son atelier au donjon de Vincennes en 1786 avec l'aide de Gribeauval, puis à Roanne durant la Révolution. L'expérience en France ne fut pas concluante. En revanche, aux Etats-Unis, qui avaient tout à créer, ce système - qu'on appela justement le "système américain" - était promis à un bel avenir. Ironie de l'histoire, c'est des USA, via Frédéric-guillaume Kreutzberger, que l'application industrielle fut importée sous le second Empire à la Manufacture impériale de Saint-Etienne. Sur la terre qui avait contribué à la faire naître !

Rue de la Résistance, Saint-Etienne